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Bienvenue dans la valise

Musique, cinéma, technologie et développement durable

Il n'y a pas (encore) de problème d'obésité en Turquie : une ode au "vrai" kébab

J'ai souvent lu un peu de tout et surtout n'importe quoi sur le kébab. J'en ai mangé en Allemagne, en France et au Royaume-Uni, mais surtout... en Turquie depuis 4 ans (et en Grèce pour la version saturée de graisses). Le tout et n'importe quoi vient principalement du fait (que les gens adorent parler de ce qu'ils ne connaissent pas) de la grande confusion qui est faite entre les différents snacks que l'on trouve en Europe et ceux que l'on mange en Turquie, nation censée être à l'origine de ce plat national qui serait plutôt persan en fait (Shawarma étant le terme libanais et encore un tout autre type de snack, à aborder dans un futur billet).

 

Le Grec

 

Tout d'abord, distinguons le Grec du kébab. En France, un Grec est un sandwich extrêmement gras contenant généralement de la viande de porc (mais pas seulement) et des frites. Imaginez l'apport calorique, c'est une catastrophe. A chaque fois que j'ai testé un Grec en Grèce c'était la même déception : trop gras et sans goût. Garnir le sandwich de frites n'apporte aucun intérêt culinaire sinon de vous gaver comme des oies.

 

Le kébab en Europe

 

Assez tristement il faut l'avouer, la mauvaise habitude de garnir le sandwich de frites s'est répandue dans les Kébabs turcs disséminés en Europe, surtout depuis l'Allemagne peu réputée pour sa finesse gastronomique. Pour cette raison, principalement, le kébab a mauvaise réputation et se trimbale une image de mal-bouffe. Par ailleurs, plusieurs fournisseurs peu scrupuleux ont parfois garni les colonnes des journaux en mal de scandale avec l'apport de viande de porc dans des broches de Döner qui sont censées en être totalement dépourvues.

 

Le "vrai" kébap

 

(Notez la différence de prononciation) Alors si l'on veut considérer que le "vrai" kébap vient de Turquie, examinons ce que l'on trouve dans ce pays. Place Taksim à Istanbul, vous trouverez parmi les plus populaires sandwichs et nul besoin de vous demander dans quelle échoppe vous diriger parmi les dizaines présentes les unes à côté des autres, vous tomberez sur la même qualité : moyenne. La viande est assez grasse, la garniture peu goûteuse, mais le snack reste délicieux. Premier choc, il n'a rien à voir avec ce que vous consommerez en Europe. Pas la peine de chercher les frites, on ne met pas ces trucs gras dans le Döner Kebap ici. Nulle part. 

 

Un peu de culture maintenant. Döner signifie tourner, c'est le mouvement donné à la viande quand elle cuit à la verticale. Kébap signifie grillé, c'est la façon de cuire la viande. Le Döner kébap est donc un "grillé tourné" en quelque sorte. Chich signifie brochette, le Chich kébap est donc une brochette de viande grillée (et non un sandwich, mais l'on peut manger un Chich kébap en sandwich, nous y reviendrons). Il y a plusieurs façons de griller la viande. Elle peut cuire dans un four électrique ou à gaz ou sur un lit de braises. Mon "Kébab" préféré fait tourner sa viande dans un caisson de braises ardentes. C'est un boucher par ailleurs qui fabrique lui-même sa mixture. 

 

Ah ! La mixture... Parlons-en ! C'est l'un des secrets du goût. Barish Usta, mon idole, réalise donc lui-même sa mixture et le goût s'en ressent, surtout qu'il choisit le lit de braises pour la cuisson lente (I love Slow food). Boucher, il sélectionne de bons morceaux de veau goûteux et honnit la viande de poulet ou de dinde. Ici une parenthèse s'impose sur le choix de la viande. Certains vous diront que la viande de mouton ou d'agneau n'est plus en vogue parce qu'elle noircit trop vite à l'air et sent fort. Ce qui est parfaitement vrai et une excellente raison de ne plus guère proposer de sandwich à la viande d'agneau. Mais ici, en Turquie, tout le monde sait que le père de la nation, Mustafa Kémal Atatürk, a conseillé à son peuple de ne pas trop consommer cette viande, plus grasse que d'autres, comme le poulet, la dinde ou le veau. Du coup, très peu nombreux sont les Turcs qui en consomment, l'agneau étant par ailleurs trop cher pour la plupart des porte-monnaies. 

 

Deuxième secret, les herbes et épices qui sont associés à la viande vont grandement déterminer le goût de votre sandwich. Mais là on touche au secret de fabrication. Sachez seulement qu'une relativement grande quantité de sel sera ajoutée à l'ensemble en usine (ou chez le boucher), aussi il convient d'éviter d'en rajouter dans le sandwich...

 

http://forum.i3d.net/attachments/offtopic-english/943200275d1265322063-english-spam-thread-d-c3-b6ner_kebab.jpg

 

Donc, pour résumer, en Turquie vous choisirez votre kébap en fonction de la provenance et donc du goût mais aussi de la qualité du fournisseur. Vous n'y trouvrez pas de frite ni de viande de porc. Vous choisirez entre de la viande de veau/boeuf ou de la viande blanche (poulet et/ou dinde); plus c'est gras plus il y a de dinde. Deux présentations sont possibles : en Pidé (petit pain rond) - que les Grecs appellent Pita - ou Durum (sorte de crèpe). Rayon garniture vous trouverez toujours salade finement hachée, tomates et oignons (pas de frites !) et parfois un peu de chou rouge, concombre, persil plat. Certains proposent sauce blanche à l'ail (qui ne contient pas de crème mais du lait fermenté) et sauce rouge aux piments. Mais les Kébabs de piètre qualité se contentent de ketchup et de mayonnaise, no comment... Côté prix, ce sera votre repas de base si vous devez vous serrer la ceinture. Un Tavuk (poulet) Durum vous coûtera en Turquie dans les 2 à 3 TL, soit d'un euro à 1,50 € suivant le cours du change. Le prix peut doubler dans les lieux touristiques et le sandwich Et (veau) Durum est juste un peu plus cher, entre 1 et 2 euros environ, grand maximum 2,50 euros.

 

http://www.istanbultraveler.net/images/tanitim/yiyecekler/durum.jpg

 

Pour conclure, sachez que de nombreux Turcs, hommes et femmes, s'en nourissent localement, surtout à midi, mais que le pays ne compte pas vraiment de problème d'obésité dans sa population. Il y a des gros, disons-le franchement, mais jamais d'obèse comme on peut en voir en Europe ou aux États-Unis, c'est donc que la nourriture ici n'est pas de si mauvaise qualité, non ? En sortie de boîte légèrement allumé le plat national est la soupe, pas le sandwich.

 

Enfin, sachez qu'il existe encore de nombreuses façons d'accomoder cette viande recomposée en lamelles qu'est le Döner. Comme par exemple dans un plat qui se nomme Iskander (ou Alexandre) qui mêle avantageusement sauce tomate, poivron vert, pain et riz, à la viande, l'un de mes plats préférés. Pour terminer, le kébap peut aussi être une simple viande hachée présentée comme une brochette et cuite au feu de bois, un vrai délice mais il en existe de tellement de sortes qu'il faudra y consacrer un autre article.

 


 

Sur la vidéo promotionnelle suivante, le procédé de fabrication vous sera bien entendu présenté sous son meilleur angle, mais vous pouvez imaginer qu'une broche produite par un boucher sera de bien meilleure qualité et c'est ce que l'on peut trouver ici en Turquie...

 

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